(Roman)
SF Urbaine
AUTEUR
:
Leandro
Avalos BLACHA
(Argentine)
EDITEUR
:
Gallimard-Folio SF 458, 8/2013 — 224 p., 6.60 €
TO :
Berazachussetts,
2007
TRADUCTION
:
Hélèné Serrano
COUVERTURE
:
Georges Clarenko
Précédente
publication
: Asphale, 10/2011 — 208 p., 16 €
Critiques :
Bifrost 65 (Laurent Leleu)
→ En
France on connaît l’Argentine de Maradona et celle du tango, à la
rigueur quelques touristes chevronnés peuvent parler des chutes
d’Iguazu de et de l’approche des Iceberg en navire de croisière,
mais le Berazachussetts
de l’écrivain argentin Léandro Avalos Blacha décrit dans ce
roman nous propose une vision fantasmée d’un quartier Buenos Aires
qui se rapproche plus des favelas de Rio, violence puissance 100, que
de l’imagerie d’Epinal des façades néo coloniales d’une ville
balkanisée par l’immigration italienne et des campagnes au fort
accent allemand. En vérité son nom provient de la compression entre
Berazateguie, un quartier de Buenos Aires bien réel, et l’état du
Massachusetts américain. En quelque 185 pages l’auteur nous décrit
toute la décomposition de notre société contemporaine où
cohabitent le consumérisme outrancier made in USA avec l’anarchie
débridée des agglomérations sud américaine surpeuplées.
Corruption, Charity Busines, société du spectacle, individualisme
forcené, perversions multiples, tout contribue à rendre à
merveille l’atmosphère putride d’un monde en décomposition que
nous livre cette histoire parfaitement déjantée. En particulier ses
héroïnes principales, quatre retraitées de l’Education
nationale, Dora, Mika, Beatriz et Susana, quatre veuves d’âge mur
dont le quotidien va être bouleversé par l’arrivé de Trash.
Normal me dirait vous, puisqu’il s’agit d’une zombie punk et
obèse qui atterrit sans crier gare dans l’appartement dont Dora
est la propriétaire et dont les quatre femmes commencent par
découvrir le pêché mignon pour la bière avant de s’apercevoir
qu’elle aime également la chair humaine. La coupable, Susana qui,
sous son air de fausse gentille, est tellement hantée par le fantôme
de son mari qu’elle a elle-même assassiné, qu’elle a fini par
tuer un malheureux garçon dont elle a ramené le cadavre dans son
appartement. Et bien vite la véritable nature des trois autres
monstres avec qui elle cohabite apparaît au grand jour. Béatriz,
que plus rien ne semble rattacher à la vie minable qu’elle mène.
Mika, trop préoccupée par sa recherche de l’homme idéal pour
s’apercevoir que celui qu’elle a déniché n’est pas la perle
rare tant attendu. Dora, la plus folle de toute, diabolique et
opportuniste qui sait parfaitement tisser son cocon autour des
méprisables victimes qui deviennent des pantins entre ses doigts. Un
quatuor à la fois félinien et digne du Affreux,
sales et méchants d
‘Ettore Scola dans lequel ont aurait insufflé des doses
d’adrénalines à la sauce virée sanglante des meilleurs séries
trash US. Car à travers le prisme de ce quatuor de mégères pas
apprivoisées, nous découvrons dans ce décor frisant l’apocalypse
un zoo de monstres les uns plus terrifiques que les autres, avec des
bandes de fils de riches violeurs qui se promènent la nuit en
filmant leurs méfaits avant d’achever leur victimes, une
groupuscule de zombies qui rêve de semer le carnage au sein de la
cité , une armée d’éclopés conduite par une la terrible
Periquita, gamine en fauteuil roulant qui terrorise toute la région,
des vitrines réfrigérées occupées par des bandes de pingouins, un
ancien maire despotiques qui voit dans le peuple qu’une bandes
d’être méprisables sur qui exercer toute sa cruauté. Conte
débridée ramenant au rang d’escapade sans prétention les virée
d’Orange
mécanique,
où les incongruités monstrueuses donnent la réplique à des
situations délirantes qui peuvent cependant s’apparenter à des
scènes bien réelles de notre univers citadins, ce livre propose une
image décalée de l’Argentine des cartes postales minée par la
misère, la violence et la débandade économique où les gens se
contentent d’agir selon leur instinct, ne s’encombrant pas d’une
morale que l’auteur lui même n’a pas choisi d’ériger comme
porte drapeau de son histoire. Roman d’action à la puissance
trash, se livre se dévore comme un film de Joe Dante ou de
Tarantino, révélant une surprise à chaque page et nous laissant à
bout de délire lorsque vient se refermer le dernier volet de ce
dépliant anti-touristique placé sous le signe du grotesque, du
carnavalesque et du fantasmagorique.
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