♦ La Panse
♦
(Roman) Fantastique
AUTEUR : Léo HENRY (France)
EDITEUR : GALLIMARD-Folio
SF 569, 2/2017 — 304 p., 8.20 €
COUVERTURE : Aurélien
Police
→ Directement paru en poche,
comme avant lui La case des continuums (également Folio SF) ce
roman est un récit d’engloutissement, ou plutôt de lente ingurgitation, celle
du héros Bastien Regnault par une société secrète, La Panse, qui tient ses mystérieux quartiers sous la dalle de La
Défense. Musicien au chômage promenant dans les ruelles de l’Est Parisien son
spleen et son éternelle solitude émaillée par les assauts de Sandra, son ex
femme, qui voudrait lui confier la garde de leur fille Noéline, Bastien
Régnault, à la suite d’un nouvel an bien arrosé, découvre un nouveau but à sa
vie : retrouver Diane, sa sœur jumelle, dont le portable ne répond plus.
Piratant son compte gmail, il finit par apprendre qu’elle a démissionné de la
brigade des sapeurs pompiers de Nanterre qu’elle avait intégrée après son
séjour dans l’armée. Ses investigations le mettent bientôt sur la trace de la
Panse, société secrète millénaire dont les tentacules souterrains se déploient
sous le bitume du quartier le plus high-tech de Paris. Invité au CNIT pour un
symposium placé sous l’égide de Ptah et d’Enki, entité mythologique jusque là
oubliée, il finit par intégrer les rangs de Neo Clean, une entreprise aux
activités plutôt floue dirigée par Mariam Zacharie et son père. Le voilà donc
fermement invité à participer aux séances de méditation journalières conduites
par la fascinante Parvadhi étroitement liée au docteur Scheffner, spécialise
des énergies, qui progresse à pas de géant au sein de l’organigramme occulte de
La Panse. Désormais engoncé dans la peau d’un banal employé de nettoyage, il va
entraîner le lecteur sur les traces de Diane, dorénavant accompagnée d’un homme
plus âgé qu’elle se faufilant tel un fantôme à travers les rouages de cet
univers en pointillé tortillant ses méandres au-dessous des tours un temps
menacée par la folie des avions d’Alcaïda. L’intrigue, menée sans véritable
digression, ne laisse pas au lecteur de le temps de reprendre son souffle et de
s’appesantir sur les horreurs qui se dévoilent au fil des pages, lui susurrant
une désagréable envie de fuir cette atmosphère pesante de complot et de
surnaturel, sans pouvoir refermer le livre avant d’en avoir parcouru les
ultimes soubresauts. Lovecraftienne, par certains côté, comme le revendique le
quatrième de couverture, l’ambiance de ce récit est cependant d’une bien plus
criante réalité que les écrits du solitaire de Providence et n’a pas besoin de
convoquer un quelconque Cthulhu pour insuffler dans nos veines cette délicieuse
sensation de frisson mélangée à une sorte de syndrome de Stockholm ressenti par
une victime qui semble trouver du plaisir à contempler les liens qui la
ligotent. Véritable tour de passe-passe mental servi par l’écriture fluide et
désespérante de Léo Henry, ce roman imprime toute sa noirceur à la manière d’un
puzzle frappé par la malédiction de la pièce manquante et s’acharne à mettre en
exergue cette impression dérangeante des regards croisés sur les quais du métro
ou le long des escalators racines plantés prés des buildings qui répètent comme
un angoissant leitmotiv : « Nous
savons tous et nous fermons les yeux, nous avons plongés les recoins de nos
âmes dans cette connaissance maudite et
il nous faut pourtant continuer d’avancer au rythme de nos petites existences
dévorées par les mâchoires d’une modernité sans cesse en
manque de proies expiatoires ».
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